Ce lieu fut, au XVIe siècle, la propriété de riches négociants espagnols. La demeure servit au XVIIe siècle d’hôpital général destiné à venir en aide aux pauvres malades, mendiants et orphelins. Après la tourmente révolutionnaire, la famille Duboueïx fit reconstruire la maison telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Les familles Despinoze ou Espinoza étaient originaires de la ville de Burgos, capitale du Royaume de Castille en Espagne. Elles remontent à Jacques Bernardino d’Espinoze de Los Monteros, héritier principal et noble, qui probablement, fut le premier à émigrer en France vers le XVIème siècle. Bien que nobles, certains membres de cette famille ont fait le choix d’être marchands et sont venus en Bretagne, en particulier à Nantes, s’établir dans les quartiers de la Fosse et de Saint-Nicolas. Ils ont rejoint d’autres négociants espagnols, tels les Rhuys, les Compludo, les De Marquès … La colonie espagnole était riche et puissante. Parmi tous ses biens, elle possédait une chapelle au Couvent des Cordeliers à Clisson.
Pierre Despinoze, né en Espagne et marié avant 1518 avec Martine De Billy, était marchand à la Fosse, à Nantes. Propriétaire de biens fonciers à Clisson, dans le quartier Saint-Jacques, près des douves du château, il aurait fondé en 1538 une chapellenie dans l’église Saint- Jacques sous le nom de Vierge Ardente. Il fut aussi l’un des principaux bienfaiteurs de l’église Saint-Nicolas à Nantes.
Il existe à Clisson une demeure dite de l’Espinose. Il est permis de penser que ce lieu a appartenu à cette famille. Parmi ses nombreux descendants, on relève, Pierre d’Espinoze, marchand échevin à Nantes (+ 1641), Jacques d’Espinoze (1599-1657), tous deux Sieurs des villages du Sauzay et de l’Epinay en Clisson, ainsi que Jacques d’Espinoze (1632-1676) Sieur de l’Epinay et son fils René d’Espinose (1660-1745) Sieur du Sauzay.
Par un édit du 14 juin 1662, Louis XIV avait ordonné à chaque ville d’ouvrir un bureau de charité ou hôpital général pour venir en aide aux pauvres malades, aux mendiants infirmes et aux orphelins.
Ne possédant pas les ressources nécessaires, la ville de Clisson ne se conforma à l’édit qu’en 1687. Grâce au fonds de 500 livres constitué par les habitants, la maison dite de l’Espinose dans le faubourg Saint-Jacques fut achetée par Jean Hallouin, Sieur de la Pénissière et Demoiselle Catherine Rambault, pour servir d’Hôpital Général (15/01/1687). A la fin de la même année, des lettres patentes du roi autorisèrent les Clissonnais à inaugurer la nouvelle administration.
En 1693, le roi retira à l’Ordre de Saint Lazare les aumôneries qu’il avait concédées en 1672 et les transféra, avec leurs revenus, aux hôpitaux généraux. En conséquence, l’hôpital général de Clisson fut rattaché à l’aumônerie Saint-Antoine et tous les services y furent déplacés (arrêts du Conseil d’août et de décembre 1695 et lettres patentes de juillet 1696).
La propriété de l’Espinose fut affermée en juin 1697 par la direction de l’hôpital Saint-Antoine aux Fermiers Généraux pour servir de prison aux faux-sauniers et contrevenants aux ordres du roi.
Au cours des guerres de Vendée, les colonnes infernales incendièrent la ville de Clisson à plusieurs reprises (1793-1794). Les bâtiments de l’Espinose furent en grande partie détruits.
Elle fut ensuite la propriété d’une famille noble (Chevaye). Le 2 août 1800, en l’étude des notaires clissonnais Jean-Baptiste Bureau et Joseph Clisson, René-Philippe-François Chevaye et Dame Marie-Jeanne-Camille Marmin, demeurant à Nantes vendent l’Espinose à Marie-Anne Lesimple veuve de Pierre Le Fort, domiciliée à Clisson, pour la somme de 1 700 francs.
« … en la commune de Clisson le lieu de Lespinose tel qu’en jouissent ladite acquéreuse, sa sœur et son beau-frère … maison incendiée, coteau et jardin… »
Au décès de Marie-Anne Lesimple, sa fille, Eulalie Lefort hérite du bien. Cette dernière est l’épouse de Louis Perraud.
Le 22 mai 1817, le notaire clissonnais François Paviot enregistre la vente de la propriété pour un montant de 8 130 francs. Les vendeurs sont Louis Perraud et son épouse Eulalie Lefort et l’acheteur est Michel-Charles Duboueix, artiste peintre en miniatures, domicilié Ile Feydeau à Nantes. Ce dernier est le fils de Michel Duboueix, premier maire constitutionnel de la ville de Clisson en 1790.
« … maison composée de quatre pièces au rez-de-chaussée, deux hautes et grenier au-dessus, cour au-devant dans laquelle il y a un puits, un engard et un petit logement, un jardin au derrière, un autre jardin, celui-ci et terrain en coteau joignant à ce dernier planté de divers arbres dans lequel il y a une masure d’un vieux bâtiment …»
« … Monsieur Duboueix devra respecter le bail à ferme en cours pour lequel il reste encore trois années à courir, passé entre les époux Perraud et le Sous-Préfet de l’arrondissement de Nantes et le Lieutenant de la Gendarmerie à Nantes pour le casernement de la Brigade de Gendarmerie résidant à Clisson … »
Vers 1822, Michel-Charles Duboueix fit rebâtir la maison telle que nous la connaissons aujourd’hui. La Duchesse de Berry y fut reçue, le 6 juillet 1828.
Un certain nombre de propriétaires sont répertoriés, tels :
- vers 1868 : Dondel de Kergégano,
- Poulpiquet du Halgoët,
- vers 1880 : l’armateur Victor Vincent, négociant sur le Quai de la Fosse à Nantes,
- vers 1900, Jules Servan Adéa époux d’Adèle de la Ville de Férolles des Dorides, officier de marine en retraite,
- en 1923, Barthélémy Palat, général de Brigade (1852-1931),
- en 1931, Mme Marie Larango (1859-1947), veuve de Barthélémy Palat,
- en 1956, Charles Coubard, médecin et président du Souvenir Vendéen (1890-1970).
En 1966, le Docteur Coubard légua la propriété de l’Espinose à la Congrégation des Sœurs de la Sagesse dont le siège est à Torfou (Association Charles Foyer, Maison Sainte-Marie).
En 2021, la maison de l’Espinose abrite encore trois religieuses âgées. Elles sont toujours au service de la communauté et de la paroisse Notre-Dame. Un projet d’habitat participatif est à l’étude.
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