Cette fresque monumentale de 140 m2 représente l’Assomption de la Vierge Marie. Elle se déploie harmonieusement dans l’abside du chœur de l’église Notre-Dame de Clisson. Elle a été réalisée par le peintre clissonnais Georges Lusseau (1897-1989) entre 1928 et 1931. L’artiste a recouru à la technique ancienne de la fresque à l’italienne ou celle du buon fresco utilisée par de grands peintres de la Renaissance italienne, tels, Fra Angélico, Giotto, Pisanello, Masaccio … Georges Lusseau a eu l’idée originale d’y représenter des Clissonnais de son époque, presque tous identifiés.
Technique de la fresque
La technique buon fresco s’effectue avec des pigments de couleur mélangés à de l’eau sur une mince couche de mortier de chaux ou de plâtre frais. En raison de la composition chimique de l’enduit, un liant n’est pas nécessaire, car le pigment de couleur, mélangé uniquement avec de l’eau, s’incruste dans le plâtre qui devient lui-même le support. Le fait que la peinture soit appliquée sur un enduit qui n’a pas entièrement séché permet aux pigments de bien pénétrer dans le plâtre et du même coup aux couleurs de durer plus longtemps.
Les couleurs employées sont des poudres, le plus souvent extraites de sels minéraux, donc d’éléments naturels. Les poudres de couleur sont mélangées avec de l’eau pure ou de l’eau mélangée avec un peu de chaux vive.
Lorsque l’enduit de mortier est sec, on applique sur le mur des maquettes de carton grandeur nature, servant de calques et représentant le dessin exact de la fresque. Ces calques, recouverts d’une première couche de couleur d’apprêt, sont appliqués sur le mortier.
Une fois les calques enlevés, le mur présente une première esquisse du dessin. Lorsque l’apprêt est sec, le peintre réalise son modèle sur l’enduit frais.
Les retouches peuvent être faites à l’œuf dans la proportion d’un jaune d’œuf battu mélangé de 10 à 12 fois son poids en eau.
Témoignage d’un admirateur anonyme
L’œuvre de Georges Lusseau a suscité l’admiration de ses contemporains. En voici un témoignage paru dans la revue de la semaine religieuse du diocèse de Nantes, datée du 3 octobre 1931.
« A première vue, on est un peu ébloui. Pensez donc, c’est une vision du ciel … J’ai admiré la clarté de la composition. Au centre Marie, couronnée par le Père et le Fils. Le Saint-Esprit plane sous la forme d’une colombe au-dessus de la Vierge. Tout autour, des anges recueillis dans une muette contemplation en chantant doucement les louanges de leur reine. C’est le calme, c’est la paix de la béatitude « le silentium magnum » de l’Apocalypse. Vers les extrémités de cette zone supérieure, d’autres anges embouchent la trompette pour annoncer à l’univers la gloire de celle que toutes les générations proclameront bienheureuse ».
« Au-dessous de cette zone, un second registre : ce sont les saints des deux testaments : les patriarches, les prophètes, les apôtres, les martyrs, les pontifes, les confesseurs, les vierges … en chacun la sainteté est marquée d’un trait bien personnel. Cette partie de la fresque a été très étudiée et il faut dire qu’elle a été merveilleusement réussie ».
« Enfin, au-dessous, troisième registre : c’est l’église de la terre, l’église militante, avec, au centre de nouveau, l’image de la Vierge à sa naissance et l’Annonciation ».
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Outre le dogme de l’Assomption, cette œuvre est porteuse de deux autres symboles chrétiens admirablement rendus :
Le premier, celui de la « communion des Saints » représenté par l’alliance de l’Eglise du Ciel et celle de l’Eglise terrestre, priante et militante, réunies pour honorer le couronnement de Marie. Le second est celui de la « représentation de l’Eglise terrestre » celle de Clisson, par les chrétiens clissonnais eux-mêmes.
Au centre, la Vierge Marie quitte la terre, c’est l’Assomption, pour être couronnée par la Trinité, Dieu le Père à gauche, le fils à droite et au-dessus d’eux le Saint-Esprit représenté symboliquement par une colombe.
Ils sont entourés par les Apôtres, les Saints, dont beaucoup peuvent être identifiés et les Anges, dans l’apothéose du paradis. Cette Assomption lumineuse éclaire le centre de la fresque. On reconnaît d’abord les douze apôtres, au premier rang. Puis, dans la partie gauche : St Pierre qui tient la clé de l’Eglise, St Jean qui tient la coupe eucharistique, St Marc auteur d’un Evangile et dans la partie droite, St Paul, St Mathieu tenant son Evangile.
Il en est de même des saints. Dans la partie gauche du ciel, sont identifiés : Jeanne d’Arc, St Maurice, les enfants nantais Rogatien et Donatien, le curé d’Ars, St Vincent de Paul, le soldat de 1914, avec son casque est le frère du peintre, René Lusseau, aviateur, abattu pendant la Grande Guerre, hommage discret du peintre rendu au sacrifice de son frère.
Dans la partie droite du ciel, on reconnaît St Louis, Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, St Stanislas Coska, St Ignace de Loyola, St Etienne premier martyr, St François d’Assise, St Bernard.
Dans la partie inférieure de la fresque, c’est l’Eglise de la Terre qui représentée : l’église de Clisson et les fidèles de l’époque. Georges Lusseau a souhaité faire figurer des Clissonnais, ses proches et ses amis. La plupart des personnages sont identifiés. Au bas de la fresque, en partant de la partie gauche vers le centre :
- Henri Lusseau de la Brebionnière, grand-père de Georges Lusseau,
- Jeanne Lusseau, née Chatelier, épouse d’Henri et grand’mère de Georges Lusseau,
- Joseph Raffegeau de Bournigal « qui mène sa bête », il est pieds nus,
- Philomène Raffegeau, son épouse, née Tesseraud à St Hilaire du Bois,
- Dans ses bras, un de leurs enfants (Pierre),
- A ses pieds, une petite fille blonde inconnue,
- De dos, Marie Limousin de St-Hilaire-du-Bois, bonne chez la mère de Lusseau,
- Dans ses bras, Annie, une des nièces de l’artiste,
- Portant la coiffe clissonnaise « la câline », Mme Dabin, née Augereau et dont le mari était surnommé « Bourneau »,
- Jeune paysan inconnu,
- Jeune paysan inconnu,
- En coiffe, Mme Jarocey du quartier de la Madeleine,
- La jeune fille à la tresse est inconnue,
- La fillette en sabots, quelques fleurs à la main, est Cécile Guillou,
- Le chien « Bergère» de Joseph Raffegeau.
Du centre, vers la droite, arrivent en procession quelques notables religieux et laïques :
- L’Evêque de Nantes, Monseigneur Eugène Le Fer de la Motte,
- Monsieur le curé Janin, curé-doyen de Notre-Dame,
- Le Chanoine Georges Durville, Clissonnais d’origine, conservateur du musée Dobrée à Nantes,
- Le Chanoine Ménager,
- En gris avec cornette blanche, une sœur de la Congrégation Hospitalière des Filles de la Sagesse dont la maison mère est à St-Laurent-sur-Sèvre,
- En noir, deux sœurs de la Congrégation de St-Gildas (sœurs garde-malades),
- Alain Boutin, jeune fils du Docteur Boutin, médecin à Clisson,
- Monsieur Branger, maire de Clisson,
- Monsieur Gautier, l’un des entrepreneurs qui a participé à la construction de l’église Notre-Dame,
- Marguerite Raould, future épouse de Georges Lusseau et devant elle, Jeannette Lusseau, nièce de l’artiste.
Cette fresque monumentale de Georges Lusseau est vraisemblablement une de ses plus belles réalisations où son talent créateur puissant et sensible est le plus tangible. Elle demeure pour les générations de Clissonnais une page de leur histoire et le plus bel ornement de leur patrimoine pictural.
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